Mais que sait-on vraiment de ce petit mollusque présent sur les tables françaises au moment des fêtes de fin d’année et, de plus en plus souvent, toute l’année ? Pas grand-chose. Présentation en XX points (source – L’Huître en questions, Les Ateliers d’Argol)
* Une huître, c’est quoi ?
L’huître est un mollusque bivalve. Ses deux coquilles sont fermées lorsqu’elle se trouve hors de l’eau, le temps d’une marée basse sur l’estran. Elle reste ainsi protégée des agressions extérieures et conserve son eau. En France, il y a l’huître ronde et plate (Ostrea edulis) ou oblongue et creuse (Crassostrea gigas).
* Où vit l’huître ?
L’huître vit dans un milieu naturel, sur le littoral marin et dans les zones d’estuaires. À l’état sauvage, elle est fixée sur des rochers (creuse) ou bien se trouve par bancs sur des sols caillouteux ou vaseux (plate).
* L’huître, depuis quand ?
Un petit peu d’histoire ne peut nuire. Les plus anciens fossiles datent du Trias (-200 millions d’années). Leur consommation remonterait à la préhistoire (-5000 ans), mais elle se serait vraiment développée à partir du Moyen-Âge. Rappelons-nous également que le cuisinier de Louis XIV, Vatel, s’est suicidé en 1671 parce que ses huîtres n’étaient pas arrivées… C’est surtout à Napoléon III que l’on doit le développement des parc ostréicoles en France. En 1860, le Morlaisien, un bateau venant du Portugal, est bloqué à cause d’une tempête dans l’embouchure de la Gironde. Il balance à la mer sa cargaison d’huîtres portugaise (Crassostrea Angulata). Au fil des années, l’huitre creuse supplante l’huitre plate, native de France. En 1875, le mot « ostréiculture » fait son apparition au Journal Officiel ; le Littré suit en 1882. En 1923, un décret interdit la culture de l’huître creuse au nord de la Vilaine, et en quelques années l’huître plate réapparaît en Bretagne. Au sud de la Vilaine, l’huître portugaise a définitivement supplanté l’huitre plate. En 1965, un ostréiculteur importe 6 kilos de coquilles de naissain d’une huître Crassostrea Gigas, robuste et à croissance rapide. Elles sont implantées à Marennes-Oléron. À partir de 1967, de nombreuses maladies apparaissent (épizooties) qui déciment les bancs naturels. En 1971, lancement de l’opération RESUR, initiée par l’Ifremer, pour remplacer les huîtres portugaises. Et, en 1997, l’Ifremer dépose le brevet français sur l’huître triploïde. En 2015, le brevet est échu.
* C’est quoi une huître triploïde ?
C’est une huître stérile, ne connaissant pas de variation de qualité, notamment pendant l’été, période de reproduction, et qui peut être commercialisée toute l’année. Ce sont les Américains qui ont été les premiers à faire des recherches pour créer un tel produit. Pour l’ostréiculteur Pascal Migliore, « « La triploïde est une huitre 2.0, créée dans un laboratoire et dangereuse pour notre milieu naturel ».
* Les arguments de séduction de la triploïde ?
Les arguments des écloseurs sont simples : ils proposent des produits calibrés et très performants, la simplification d’un grand nombre de gestes (pas de transport de collecteurs de naissain, pas de détroquage, transfert de poches simplifié), moins d’incertitudes que dans l’élevage naturel, pousse en deux ans et commercialisation toute l’année.
* Comment reconnaître une huitre triploïde ?
Aucun étiquetage n’est exigé. Par-delà un étiquetage non obligatoire sur les bourriches, il est impossible de reconnaître une huître plutôt qu’une autre.
* Le goût de la triploïde est-il différent de la naturelle ?
Oui et non. Le goût de la triploïde est stable toute l’année ; celui de l’huître naturelle varie toute l’année en fonction des éléments naturels. Parfois, leur goût sera proche, parfois moins. Objectivement, il n’est pas possible de dire que l’une est meilleure que l’autre, si ce n’est que l’huître naturelle a le goût de l’authentique.
* La triploïde, un risque pour la santé ?
Aujourd’hui, aucun risque pour la santé n’a été identifié. En 2001, l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) estimeque, « dans l’état actuel des données disponibles, le caractère polyploïde des huîtres ne paraît pas constituer en lui-même un facteur de risque sanitaire ».
* Quel est le marché aujourd’hui de la triploïde en France ?
D’après nos informations, la triploïde a représenté jusqu’à 60-70% du marché national. Il semble aujourd’hui plus proche de 50%.
* Pourquoi ne pas rendre l’information au consommateur obligatoire ?
Comme l’explique l’ostréiculteur Pascal Migliore, ce n’est pas si simple : « Le monde de l’ostréiculture est un monde particulier… Les collègues ne souhaitent pas trop que ce débat devienne public. Le rapport de force entre les uns et les autres n’est pas toujours amical. Si le sujet prend de l’ampleur, les tensions ne feront qu’augmenter. »
Publication Atabula, PRODUITS & PRODUCTEURS
du 13 mars 2018