La soupe est l’un des plus anciens mets de l’histoire de l’humanité.
Sa genèse commence avec la domestication du feu par l’homme (- 800 000) qui lui permit de faire cuire les aliments et de diversifier sa nourriture : ainsi il fait chauffer de l’eau dans un pot posé dans un trou de pierres ardentes dans lequel il mélangera au gré de ces envies des os, de la viande, du poisson, des racines, des végétaux, des graines….
D’ailleurs, dès l’époque néolithique (-12 000 à – 2500), on retrouve des traces de récipients qui auraient servi à ces usages et en Asie du Sud-Est des vestiges de bambous que les hommes remplissaient pour chauffer à même le feu.
Mais c’est surtout avec les prémices de l’agriculture et la culture des céréales que se poursuit ce virage alimentaire. La maîtrise de la poterie qui permet une cuisson plus aisée des aliments liquides s’est développée durant toute l’antiquité notamment sous le développement des civilisations méditerranéennes : Sumérienne, Égyptienne, Grecque et Romaine : à Athènes, la soupe de lentilles était servie aux troupes pour qu’elles gardent le moral et les Romains affectionnaient les soupes de vin.
Que ce soit d’est en ouest ou du nord au sud, ce phénomène alimentaire se retrouve dans toute la base de l’alimentation mondiale : les paysans chinois préparaient des soupes de riz ou de fève, les byzantins des soupes de légumes et de poissons agrémentées de miel, les Romains des soupes très poivrées concoctées avec du gibier, des volailles, de la viande, du miel, du vin et des herbes qu’ils appelaient soupe noire.
Les invasions du 1er millénaire marquèrent un enrichissement dans les coutumes culinaires et notamment la façon de préparer les soupes.
Au Moyen-Âge (du Vème au XVe siècle), le pain devient le centre de l’alimentation paysanne ce qui va considérablement changer la manière de consommer le bouillon qui sert avant tout à tremper le pain. Cette « soupe trempée » ou brouet constituait le plus souvent le plat chaud unique de la classe paysanne.
Au quotidien, les céréales sont préparées pour la soupe souvent constituée à base d’orge et d’épeautre. Les jours de fêtes ou de noces, la soupe est améliorée de légumes comme l’artichaut ou les fèves, de pois, de chou, d’oignon, de pissenlit, de fleurs tandis que les seigneurs dégustent des potages agrémentés d’épices.
On lui reconnaît aussi à cette époque des vertus thérapeutiques en particulier les bouillons de poule ou de coq.
Le mot « soupe » (du latin suppa voulant dire « tremper ») désigne d’ailleurs au XIIe siècle, la tranche de pain qu’on arrose d’un bouillon qui peut être fait de vin, de céréales, de viandes, de volailles, de gibiers, de racines, d’herbes et qui est placée dans les écuelles de terre, de bois ou d’étain. La soupe est servie telle qu’elle ou fouettée pour changer de texture.
Au Moyen-âge puis à l’époque gothique, les plus riches consomment les soupes agrémentées de miel, de verjus, de plantes aromatiques et les apprécient souvent très épicées.
Ainsi au XVII e siècle, la diversité des recettes de soupes s’est tant enrichie et embourgeoisée qu’elles ne sont plus assimilées à un plat de pauvre mais deviennent de précieux « veloutés », « crèmes », « consommés » placés à l’honneur sur les tables royales…
Louis XV créera d’ailleurs « le potager royal » signe de son engouement pour les légumes et leur préparation.
Sujet emblématique de distinction sociale, à partir du XVIIIe siècle on parle de « potage » (littéralement cuits dans le pot), mot à consonance « noble » pour désigner un mets léger , sorte de mise en bouche , aux vertus digestives servi lors des dîners des plus nantis (on en déguste de trois à cinq avant la suite du repas qui peut être constitué lui-même d’une dizaine de plats)… alors que le mot « soupe » considéré à la cour comme vulgaire garde une connotation paysanne qui désigne le plat unique des campagnes dont le rôle reste avant tout de demeurer consistant et nourrissant.
Vous avez dit un peu de soupe… mais laquelle ?
Quelques petites explications sur les soupes contemporaines :
La soupe est un bouillon ou de l’eau dans lequel on fait cuire des aliments solides. Il peut être constitué notamment de légumes, de viandes, de poissons ou de racines (époque médiévale) qui seront plus ou moins grossièrement coupés selon la consistance souhaitée …
D’origine paysanne, il décrit le plus souvent un plat consistant qui peut suffire au repas, notamment le soir, et fréquemment servi avec du pain.
Le potage est une forme de soupe évoluée. On retrouve sous ce terme les consommés (potages clairs) aussi bien que les bisques, crèmes et veloutés (potages liés). Il peut être consommé chaud ou froid, mais on privilégiera de la boire en début de repas à l’exception des soupes de fruits (exemple soupe de fruits rouges). Compact, agrémenté de viandes, de poissons, de lard, on y peut y ajouter aussi du beurre ou de la crème.
La bisque est un potage onctueux de crustacés. Il s’agit presque d’un coulis constitué des chairs et des carcasses des crustacés réduits en purée, liés au vin, très assaisonnés et souvent accompagnés de crème fraîche et d’écrevisses. Pour la petite histoire, le mot bisque vient très certainement du fait que les chairs étaient cuites à deux reprises « bis cuites ». Au XVIIe siècle, la bisque était constituée de pigeonneaux et était servie aux seigneurs alors qu’aujourd’hui elle est préparée avec des homards, des écrevisses, des crabes ou de crevettes.
Le mot brouet vient de l’ancien français du XIIIe siècle « breu » signifiant bouillon.
Déjà connu en Grèce antique, le brouet était très consommé durant tout le Moyen-Âge (du Vème au XVe siècle). Il s’agissait d’un plat semi-liquide composé de viandes de porc, de racines, d’herbes, de sang qui était souvent consommé par les plus modestes lorsqu’ils amélioraient leur ordinaire (du fait de la présence de la viande).
Le consommé : il s’agit d’un bouillon de viande concentré. Il se fait souvent à base de fond de blanc de volailles, de bœuf, de veau que l’on va ensuite clarifier, c’est-à-dire chauffer pour que les impuretés se déposent dans le fond et qu’elles puissent être supprimées.
La garbure vient du mot gascon « garbure » du sud-ouest de la France. Son origine est béarnaise. Il s’agissait d’une soupe épaisse faite de chou, le pain de seigle, de légumes, de lard, d’oies qui était l’aliment des paysans gascons au quotidien. Ainsi, selon les moyens ou les saisons, elle variait. Le point commun était une cuisson longue visant à confire viandes et légumes. Aujourd’hui, la garbure varie dans sa consistance, selon qu’on la serve en potage ou en plat de résistance. On peut aussi donner libre cours à son imagination et y mettre tout un tas de légumes frais ou secs, des châtaignes et des viandes comme les cuisses de canard confites, le jarret de porc, des saucisses, des gésiers.
Selon les régions, la préparation du gaspacho diffère, notamment le gaspacho andalou et portugais